PHILO-PERFORMANCE(s)

Le cluster PHILO-PERFORMANCE(s) se propose de tracer les lignes d’un champ d’interrogations académiques et artistiques autour du dialogue entre la philosophie et les arts du spectacle vivant. Notre volonté est d’adresser une question fondamentale qui n’a cessé de nourrir ces échanges à travers l’histoire, et que l’on voit rebondir de multiples façons au sein des développements théoriques et artistiques qui sont ceux de notre contemporanéité. 

Cette question est celle de la « réalité ». Question perpétuellement reprise par la pensée philosophique, le réel se trouve également parmi les interrogations-clés du processus de création dans les arts vivants. Ce volet s’appuie simultanément sur ce que l’on peut estimer comme une multiplicité foisonnante des traitements du réel par la philosophie (tels que déployés au sein des périodes historiques et traditions culturelles les plus diverses) et, respectivement, sur une des problématiques des arts vivants qui a le plus interpellé ceux-ci sur le thème du réel – le concept et pratique de la « performance ». En ce faisant, nous comptons donc démarrer un débat sur les correspondances que l’on pourrait dresser entre philosophie et performance à propos du réel. 

Comme point de départ, le cluster se propose de chercher des correspondances entre la philosophie contemporaine (tant continentale, qu’analytique) et les mouvements expérimentaux ou dits « d’avant-garde » des arts performatifs du XXe-XXIe siècle. 

Pour sa part, la philosophie du XXe-XXIe siècle a forgé sa conception du réel autour d’un questionnement continu sur ce que la philosophie moderne (dans le sillage de Kant) avait légué comme division insurmontable du réel entre une réalité subjective et une réalité extérieure au sujet. Certaines approches philosophiques (comme celles d’inspiration phénoménologique) ont approfondi une telle division, en pariant sur la réalité subjective comme seule réalité accessible. D’autres « voix » (du poststructuralisme français aux divers courants néo-réalistes récents) ont remué cette perspective, en soutenant la nécessite d’intégrer le sujet dans le réel. 

De son côté (et à la même époque), au cœur du théâtre et cinéma expérimental et de beaucoup d’autres manifestations artistiques revendiquant l’appellation de « performance » s’est insérée la question du rapport entre le réel et la performance. Celle-ci s’est vu définir comme un processus artistique moyennant le réel lui-même comme matériau. Par ailleurs, tout comme la philosophie contemporaine, la performance artistique expérimentale met au centre de ses interrogations sur le réel la problématique de la division de celui-ci entre une réalité objective (le côté spatio-temporel – avec son contexte historique, ses actions et évènements) et une réalité performative « expressive », marquant la présence des sujets (personnages, acteur.rice.s, artistes, public…).

Un tel rapprochement entre la philosophie contemporaine et les arts vivants expérimentaux ne constitue qu’un des volets (tel que centré sur la contemporanéité avant-gardiste occidentale) que ce cluster voudrait développer. Notre intention est de couvrir également d’autres périodes historiques et courants artistiques et philosophiques, et, en outre, des traditions de pensée et pratiques artistiques non-occidentales.